Sylvain Kerspern - dhistoire-et-dart.com
JACQUES STELLA, CATALOGUE
FLORENCE (1616-1621)


Sommaire de la rubrique Stella - Table générale

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Mise en ligne le 10 octobre 2013
Les années florentines : quelques remarques.

Pour Daniel Ternois

Les premiers ouvrages d’importance connus de Poussin prennent place alors qu’il approche la trentaine : la Mort de la Vierge de Sterrebeeck, autrefois à Notre-Dame, est datable de 1623. Il ne semble pas que l’on en envisage pour Vouet avant ses 25 ans, qu’il prend en 1615. Si le cas de Le Sueur, à la carrière brève et fulgurante, permet d’en compter, c’est dans le cadre du fonctionnement de l’atelier de ce dernier. Autre prodige, et cas execptionnel, on connaît des ouvrages de Le Brun autour de ses vingt ans voire un peu avant. Encore est-ce dans un contexte favorable, celui du renouveau artistique au temps de Richelieu, et pour une figure centrale - un Premier peintre du roi, directeur de l’Académie, grand ordonnateur des arts du dessin à Versailles - particulièrement servie par les témoignages écrits ou figurés sur sa production.

Or pour Stella, on peut réunir un ensemble déjà intéressant jusque vers l’âge qui était celui, alors, de la majorité légale, 25 ans; celui aussi de son premier chef d’oeuvre, la gravure de la Cérémonie des Tributs. Si le cadre florentin est, a priori, favorable aux arts, il faut qu’il ait su s’y distinguer pour qu’autant de témoignages de ce séjour capital nous soient parvenus, certains étant apparemment restés sur place. Ce sont essentiellement des dessins et des gravures, qui le situent dans la mouvance de Callot et autour de la vie animée de Florence, avec, déjà, des préoccupations propres qui s’affirment : mesure, bienveillance, goût pour les détails familiers; je crois fermement que filtre déjà un regard sur Caravage, possible par le voisinage avec Artemisia Gentileschi et le passage de Honthorst retournant aux Pays-Bas.

Il faut insister sur la technique graphique, essentielle pour comprendre l’artiste au travail, et particulièrement pour le séjour florentin. Très vite - dès 1619 et le Joyeux buveur -, Stella se sert de vigoureuses hachures qu’un trait continu et fluide peut associer en guirlandes, qui peuvent se croiser, et qui se combinent à des notations ponctuelles, mais aussi ménagent des zones “en réserve” servant aux volumes. J’ai souligné ce travail dès mon article de 1994 (bientôt vingt ans), et noté qu’il se prolongeait dans les premières années à Rome, au moins jusqu’à l’époque des “camayeux”; c’est même ce qui contribuait, selon moi, à soutenir l’idée que ces gravures sur bois, qui reproduisaient ce processus, étaient de la main même de l’inventeur.

Le lien avec l’activité de graveur, particulièrement évident pour la période toscane, introduit un certain flottement pour certains ouvrages, entre les dernies mois à Florence et les premiers à Rome (et le problème se reproduira à propos du retour en France). Stella n’abandonne définitivement la pratique de la gravure qu’après 1629. Certains arbitrages pourront être faits sur des données positives; d’autres seront des extrapolations personnelles dont j’espère qu’elles convaincront à l’oeil...

Jusqu’alors, aucune peinture n’avait été proposée avec quelque assurance pour ce séjour en Toscane - tel était encore mon constat dans mon étude pour le Bulletin de l’association des historiens de l’art italien en 2008. C’est chose faite, en espérant que de futures retouches lui trouvent des compagnes.

Sylvain Kerspern, Melun, jeudi 10 octobre 2013
Oeuvres
datées de 1618-1619
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autour de 1618-1619
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datées de 1620-1621


autour de 1620-1621
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Pour accéder aux notices, cliquez sur les images.
MENTIONS ANCIENNES
- Ouvrages pour les noces de Ferdinand de Gonzague avec Catherine, soeur de Cosme de Médicis, en février 1617; voir biographie.

- Sainte Thérèse et son frère demandant le chemin pour prêcher les infidèles à un cavalier espagnol; «cette petite pièce a été gravée à l’eau-forte par M. Stella pendant son séjour à Florence, quoyque son nom ny sa marque ne s’y trouvent pas » (Mariette 1851-1860, t. IV, p. 265; Thuillier 2006, p. 46 (non retrouvé).
Faute de connaître la gravure, dont les dimensions doivent avoisiner celles du Songe de Jacob, on ignore ce qui motive Mariette à la situer à Florence; si seul le style en fut responsable, il faudrait peut-être plutôt la rapprocher des fêtes de canonisations de 1622.
ARTICLE DU BAHAI N°14, 2008 : ERRATA
Le Bulletin de l’association des historiens de l’art italien m’a généreusement ouvert ses pages pour un important point concernant la part italienne de l’oeuvre de Jacques Stella (« Premiers pas de Jacques Stella en Italie », BAHAI n°14, 2008, p. 121-127); malheureusement, les circonstances, et une focalisation sur le parti méthodologique de la revue de référencement des notes (recourant aux abréviations latines, obscures pour qui n’en a pas la pratique, comme moi) ont fait que des contresens s’y sont glissés. Je les corrige ci-dessous.

Sylvain Kerspern, novembre 2013

- p. 122 : « La Danse était datée de 1621 environ dans le catalogue de l’exposition de 2006. Ce nouveau repère permettrait d’envisager une exécution un peu antérieure pour le dessin de l’Ensba, La flagellation : son style, plus lâche et gracile que le Vendeur de tripes pour chat signé et daté de 1621, prolonge encore celui de la feuille parisienne ».
Le texte est incompréhensible, puisque le dessin porte une date, 1618; je voulais justement me servir de lui pour situer la Danse dans la production florentine, pour l’en rapprocher et marquer la distance avec le Vendeur de tripes pour chat de 1621.

Lire : « La Danse était située vers 1621 par le catalogue de l'exposition de 2006. Ce nouveau repère daté (La flagellation de 1618) permettrait d’envisager pour elle une exécution un peu antérieure : son style, plus lâche et gracile que le Vendeur de tripes pour chat signé et daté de 1621 (n°10 de l’exposition de 2006), prolonge encore celui de la feuille parisienne ».
- p. 123, à propos des « camaïeux » : « L’exposition en a montré quelques exemples, la monographie de Jacques Thuillier, qui insiste sur leur importance, en publie d’autres, mais l’ensemble dépasse la centaine d’images. L’hypothèse qui rattache Stella au jubilé de l’année 1625 est fort vraisemblable. La part qu’il aurait prise dans l’exécution est à mes yeux très grande. »
La correction a mis Stella au lieu de l’ensemble des camaïeux; de plus elle relativise par un conditionnel ma conviction que celui-ci a été également gravé par notre artiste.

Lire : « L’exposition en a montré quelques exemples, la monographie de Jacques Thuillier, qui insiste sur leur importance, en publie d’autres, mais l’ensemble dépasse la centaine d’images. L’hypothèse qui le rattache au jubilé de l’année 1625 est fort vraisemblable. La part prise par Jacques dans l’exécution est à mes yeux très grande ».
- p. 125, sur la situation florentine ou romaine de certains dessins, et particulièrement de la copie d'après Caravage : « Le style graphique est en parfaite concordance avec le petit groupe d’oeuvres romaines de Stella discuté jusqu’ici. »
Avant de réfléchir sur le statut, florentin ou romain, de ces feuilles, il n’avait été question que de la production toscane.

Lire : « Le style graphique est en parfaite concordance avec le petit groupe d’oeuvres (implicitement : florentines) discuté jusqu'ici ».
- p. 127 note 22 : « Ibid, p. 77. »
La formule latine renvoie à la référence de la note précédente, soit le catalogue de l’exposition de Lyon et Toulouse de 2006-2007, alors que mon texte original citait la monographie de Jacques Thuillier. Illustration, malheureusement, de la difficulté de se servir d’outils dont la pratique se perd.

Lire éventuellement comme pour la note 24 : « Jacques Thuillier, Op. cit. note 1, p. 77 ».

Détail de la gravure des Tributs laissant voir dans le fond
des tracés perspectifs, mentionnés dans cet article (p. 123)
pour le lien à faire avec la seconde « démonstration » de Brunelleschi. Voir aussi ici

Vocation de saint Mathieu d'après Caravage (Offices),
mentionnée dans cet article (p. 125)